jeudi 29 mars 2012

Livre : Daniel de Montplaisir, "Le comte de Chambord, dernier Roi de France".

Daniel de Montplaisir, Le comte de Chambord, dernier Roi de France, éd. Perrin, 2008.
ISBN : 978-2-262-02146-7

Note : * * * * *

Commentaire : Un plaisir. Ce livre se lit d'une traite car le lecteur est pris par les enjeux politiques que permettent les différents temps du XIXème siècle pour un possible retour à une monarchie bourbonienne. Jusqu'au bout, ce qui fut pour certains Henri V, le comte de Chambord a suscité du respect pour ses convictions et son sens moral qui, jamais, n'allèrent contre les Français au risque de perdre pour toujours l'occasion d'être Roi de France.

Livre : Michel Bernard Cartron, "Seul contre Napoléon, les 100 jours du duc d'Angoulême".

Michel Bernard Cartron, Seul contre Napoléon, les 100 jours du duc d'Angoulême, éd. Artena, 2008.
ISBN : 978-2-35154-012-3

Note : * * * *

Commentaire : Pour percevoir, du point de vue des Bourbons, les Cent-Jours qui ont ébranlé le retour à la paix promis grâce au retour du Roi Louis XVIII, ce livre tient ses promesses. En effet, il est permis de suivre les phases qui poussèrent Louis XVIII et sa famille à quitter les Tuileries ; ainsi que d'être le témoin de la combativité et l'engagement militaire de Louis-Antoine d'Artois, duc d'Angoulême, pour que son oncle retrouvasse le trône de France. Ce prince, né à Versailles le 6 août 1775, est méconnu, critiqué, ou pire, ignoré. Cependant, celui qui sera Louis XIX, à la mort de son père, se montra éclairé sur les intérêts de l’État et sur le rôle qu'il devait jouer en tant que second dans l'ordre de succession à la couronne de France.

lundi 26 mars 2012

Livre : Guillaume de Bertier de Sauvigny, "Au soir de la monarchie, histoire de la Restauration".

Guillaume de Bertier de Sauvigny, Au soir de la monarchie, histoire de la Restauration, éd. Flammarion, (1955) 1974.
ISBN : 2-08-060753-7

Note : * * * * *

Commentaire : Une œuvre magistrale. Le lecteur est emporté durant ces quinze années de stabilité et de paix retrouvées. Cela permit à la vie intellectuelle et artistique de renaître. L'auteur nous plonge au cœur de la vie économique, sociale et culturelle d'une époque. Cela pour cerner non seulement les réussites mais aussi les erreurs commises par les différentes personnalités qui animèrent les ministères, les Chambres, les organes de la Restauration.
"Pour la première fois, les partis ont pu confronter librement leurs points de vue et de ce choc pacifique se sont dégagées des théories politiques et des règles de procédures." En 1829, Stendhal affirme qu'il "faudra peut-être des siècles à la plupart des peuples d'Europe pour atteindre au degré de bonheur dont la France jouit sous Charles X".

dimanche 18 mars 2012

Livre : Françoise de Chabot, "Henri de la Rochejaquelein et la Guerre de la Vendée".

Françoise de Chabot, Henri de la Rochejaquelein et la Guerre de la Vendée, Yves Salmon éditeur, (réédition de 1890) 1980.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * *

Commentaire : Un plaisant ouvrage qui relate la vie passionnante d'Henri de la Rochejaquelein.

Livre : François d'Ormesson et Jean-Pierre Thomas, "Jean-Joseph de Laborde, Banquier de Louis XV, mécène des Lumières".

François d'Ormesson et Jean-Pierre Thomas, Jean-Joseph de Laborde, Banquier de Louis XV, mécène des Lumières, éd. Perrin, 2002.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * * *

Commentaire : Un livre dense qui retrace la vie passionnante de ce Béarnais, né en Espagne, qui fut, à trente ans, un des hommes les plus riches. Laborde conseilla Louis XV, Voltaire et d'autres dans la gestion de leurs portefeuilles financiers et cela avec une intégrité sans faille. Mécène privé et promoteur du nouvel urbanisme parisien.

Livre : Marina Grey, "Le baron de Batz, le d'Artagnan de la Révolution".

Marina Grey, Le baron de Batz, le d'Artagnan de la Révolution, éd. Perrin, 1991.
ISBN : 2-262-00678-4

Note : * * *

Commentaire : Cette biographie courte, à cause de la vie mystérieuse de cet homme, est intéressante pour percevoir la vie et l'engagement politique de cette personnalité qui mourut sous le règne du peu reconnaissant Louis XVIII.

mercredi 14 mars 2012

Livre : Pierre de Nolhac, "La résurrection de Versailles".

Pierre de Nolhac, La résurrection de Versailles, souvenirs d'un conservateur 1887-1920, éd. Perrin, 2002.
ISBN : 2-262-01983-5

Note : * * * *

Commentaire : Un livre indispensable à tous les amoureux du domaine de Versailles. Pierre de Nolhac (1859-1936) nous plonge dans les méandres de la conservation, de la restauration d'un château où peu de personnes ne voulaient être envoyées. Voir comment un château peut renaître est tout à fait passionnant.

Livre : Jacques Levron, "Marie Leszczynska, Madame Louis XV".

Jacques Levron, Marie Leszczynska, Madame Louis XV, éd. Perrin, (1987) 2006.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * *

Commentaire : Une belle biographie sur la Reine de France et l'épouse de Louis XV. Il est tout à fait juste de lire cet ouvrage pour cerner la personnalité de Marie Leszczynska qui savait soutenir à sa manière son époux. Elle fut une reine qui sut, avec intelligence, ne pas s'opposer à Madame de Pompadour et à l'amour de celle-ci pour le Bien-Aimé. Elle se révèle être une épouse aimante et fidèle à son royal mari.

Livre : Paul Morand, "Fouquet ou le Soleil offusqué".

Paul Morand, Fouquet ou le Soleil offusqué, éd. Gallimard Folio Histoire, (1961, 1985) 2004.
ISBN : (à compléter)

Note : * * *

Commentaire : L'académicien Paul Morand (1888-1976) possède une écriture fluide et agréable. Ce court ouvrage est le moyen d'aborder la vie de Nicolas Fouquet. En effet, ce livre est une sympathique introduction avant de lire la biographie plus détaillée écrite par Jean-Christian Petitfils.

Livre : Anne Bernet, "Madame de Sévigné".

Anne Bernet, Madame de Sévigné, éd. Perrin, 2009 (1996).
ISBN : (à compléter)

Note : * * * * *

Commentaire : Une biographie dense qui permet de percevoir ce que fut cette femme que nous connaissons tous à travers son œuvre épistolaire. Jamais elle ne prétendit posséder un talent littéraire et pourtant... Cet ouvrage est un don d'Anne Bernet qu'il est indispensable de lire pour comprendre cette femme passionnée.

Livre : Hans-Otto Meissner, "La Pérouse, Le gentilhomme des mers".

Hans-Otto Meissner, La Pérouse, Le gentilhomme des mers, éd. Perrin, 1988.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * * *

Commentaire : Une œuvre formidable. La vie de cet homme extraordinaire est exemplaire. A travers lui, il est possible de percevoir une certaine mentalité de l'époque. Comme le titre l'indique Jean-François de Galaup, comte de La Pérouse, est un gentilhomme. Une expédition fascinante faite par un homme droit, humaniste, lucide, et fidèle à son érudit protecteur, Louis XVI.

Livre : Jean Chalon, "Chère Marie-Antoinette".

Jean Chalon, Chère Marie-Antoinette, éd. Perrin, 1988.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * *

Commentaire : A la lecture de cette biographie, Jean Chalon exprime son amour pour cette femme et Reine de France. Ainsi, l'expression de cet amour tout au long de ces pages peut être jugée non seulement comme une maladresse mais aussi comme une réussite. Libre au lecteur d'apprécier ce livre. Cependant, il ne sera pas possible de dire que l'auteur Jean Chalon n'est pas passionnée par son sujet.

Livre : Jean-Dominique Bourzat, "Les Après-Midi de Louis XVI".

Jean-Dominique Bourzat, Les Après-Midi de Louis XVI, éd. La Compagnie Littéraire, 2008.
ISBN : (à compléter)

Note :  * *

Commentaire : Après un début qui évoque des faits erronés et parfois un peu réducteur sur la personne de Louis XVI, Jean-Dominique Bourzat propose de percevoir la personnalité de l'homme dans son intimité. L'auteur évoque les activités et les intérêts intellectuels de ce Roi tels la vénerie, les sciences et l'humanisme, sa bibliophilie, son anglophilie,...

lundi 12 mars 2012

Livre : Claude Quétel, "Les lettres de cachet, Une légende noire".

Claude Quétel, Les lettres de cachet, Une légende noire, éd. Perrin, 2011.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * *

Commentaire : Claude Quétel offre un livre qui permet de comprendre enfin les enjeux d'une lettre de cachet, sa fonction, son rôle judiciaire... Surtout, Claude Quétel démontre que cette "légende noire" n'est pas si obscure que ce que certains ont voulu laisser croire.

Livre : Michel de Saint Pierre, "Monsieur de Charette, Chevalier du Roi".

Michel de Saint Pierre, Monsieur de Charette, Chevalier du Roi, éd. Folio Gallimard, 1982.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * * *

Commentaire : Déjà parue aux éditions de la Table Ronde, cette œuvre allie hauts faits historiques, bien souvent ignorés ou volontairement oubliés, et beauté de l'écriture. Ce livre sur une des plus charismatiques personnalités de notre Histoire suscite un véritable plaisir et une totale évasion aussi digne et aventureuse que la vie de François-Athanase Charette de la Contrie (1763-1796).

Livre : Pierre-André Lablaude, "Les Jardins de Versailles".

Pierre-André Lablaude, Les Jardins de Versailles, éd. Scala, 1998.
ISBN : 2-86656-173-2

Note : * * *

Commentaire : Un livre à posséder dans sa bibliothèque,et, à lire pour percevoir la dimension et l'histoire des Jardins du domaine de Versailles. Véritables pendants de la vitrine du royaume de France qu'est le Château.

Livre : Jérémie Benoît, "Le Grand Trianon un palais privé à l'ombre de Versailles".

Jérémie Benoît, Le Grand Trianon, un palais privé à l'ombre de Versailles, de Louis XIV à Napoléon et de Louis-Philippe au général de Gaulle, éd. du Gui, 2009.
ISBN : 978-2-9517-4178-2

Note : * * * * * 

Commentaire : Un livre rare et cher et pourtant Ô combien indispensable pour les amoureux du Trianon de marbre. Jérémie Benoît offre à tous un livre qui a le mérite de raconter l'évolution du Grand Trianon et ses aménagements depuis sa création jusqu'à la Vème République.

Livre : Pierre Verlet, "Le Château de Versailles".

Pierre Verlet, Le Château de Versailles, éd. Fayard.
ISBN : 978-2-213-01600-9

Note : * * * * *

Commentaire : "Ce livre a été écrit pour glorifier une œuvre. Cette œuvre est un château [...]" et c'est Versailles. Pierre Verlet (1908-1987) a écrit un ouvrage indispensable pour suivre l'incessant et vaste chantier qu'a été le Château de Versailles. Une bible.

dimanche 11 mars 2012

Livre : Daniel Gallet, "Madame de Pompadour ou le pouvoir féminin".

Danielle Gallet, Madame de Pompadour ou le pouvoir féminin, éd. Fayard, 1985.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * * *

Commentaire : Danielle Gallet-Guerne a proposé une biographie des plus abouties malgré les travaux biographiques récemment parus. Cet ouvrage est à lire absolument, surtout par celles et ceux qui se passionnent pour cette grande figure du siècle des Lumières, pour cette femme sensible aux arts, pour cette personnalité forte et courageuse du règne du "Bien-Aimé" Louis XV.

Livre : Olivier Chaline, "L'année des quatre dauphins".

Olivier Chaline, L'année des quatre dauphins, éd. Flammarion, 2009.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * *

Commentaire : Cet ouvrage se lie très vite et plaisamment. Olivier Chaline raconte la funèbre période durant laquelle Louis XIV voit se succéder quatre dauphins. Alité et mourant, le Roi-Soleil embrassera et donnera sa bénédiction à un enfant de cinq ans, le duc d'Anjou, que nous connaîtrons sous le nom de Louis XV.

Livre : Jean-Christian Petitfils, "Le véritable d'Artagnan".

Jean-Christian Petitfils, Le véritable d'Artagnan, éd. Tallandier, 2002.
ISBN : (à compléter)

Note : * * * *

Commentaire : Fidèle à lui-même, Jean-Christian Petitfils offre au lecteur et au féru d'histoire une biographie exemplaire. Il y raconte la véritable vie du plus célèbre mousquetaire pour démontrer devant tous que ce Gascon eut une existence aussi riche, voire plus riche, que celle du protagoniste des Trois Mousquetaires d'Alexandre Dumas.

Livre : Suzanne Varga, "Philippe V Roi d'Espagne, petit-fils de Louis XIV".

Suzanne Varga, Philippe V Roi d'Espagne, petit-fils de Louis XIV, éd. Pygmalion, 2011.
ISBN : 978-2-7564-0181-2

Note : * * * * *

Commentaire : Suzanne Varga se consacre depuis trente ans au siècle d'Or espagnol. Elle a reçu pour cette biographie le Prix Hugues Capet. Le plaisir de la lecture est non seulement dû à la plume de l'auteur mais aussi à la rigoureuse précision historique, à la perspicace tentative de cerner la personnalité du Roi d'Espagne. Cette œuvre est une pièce majeure pour qui s'intéresse à l'histoire du XVIIIème siècle.

Louis XVI et Marie-Antoinette : Les raisons de longues années d'attente avant la mise au monde des héritiers du Trône.

" Un jour de l'automne 1772, au cours de l'un de leurs entretiens familiers, le roi [Louis XV confie à La Martinière, chirurgien du roi,] les difficultés que rencontre toujours Louis-Auguste [futur Louis XVI], âgé maintenant de dix-huit ans, à consommer son mariage qui date déjà de trois ans. Comme l'a noté le duc Croÿ l'année précédente : "Monsieur le Dauphin, quoique se fortifiant, n'aime que la chasse et ne paraît pas s'adonner au mariage : on marie trop tôt ces jeunes princes..." C'est d'autant plus préoccupant qu'il est maintenant l'héritier du Trône : "Le mois dernier, dit le roi à Germain [Pichault de La Martinière], j'ai exigé de mon petit-fils une confession exacte sur le degré d'intimité conjugale où il se trouve et il m'a avoué que, dans les tentatives qu'il fait pour consommer son mariage, il s'est toujours trouvé arrêté par des sensations douloureuses, mais qu'il ignore si cela vient tient à un défaut de conformation ou à d'autres causes. Voyez donc ce qu'il en est !" La Martinière convoque Lieutaud, le médecin du prince, et lui expose carrément la situation. Un ordre du roi ne se discute pas et on fait venir le jeune époux ; La Martinière lui demande de se déculotter puis de se "décalotter", ce qu'il fait un peu difficilement mais complètement. Et le chirurgien peut rapporter au Roi : "L'instrument est bon mais il apparaît que Son Altesse ne sait pas s'en servir !" Malgré tout ce qui a été évoqué, on peut être certain que, si un phimosis avait été constaté, le roi aurait exigé l'intervention que le Dauphin aurait été obligé d'accepter ; mais les difficultés à conclure son mariage sont ailleurs.

Portrait de Germain Pichault de la Martinière (1697-1783), par François-Adrien Grasognon Latinville (?-1774), Musée du Val de Grâce à Paris.
[...]

[Après la mort de Louis XV], les praticiens de la Cour n'ont que peu à faire pour la santé du ménage royal, qui est jeune et sain. Mais la grande affaire du moment qui inquiète l'entourage médical du jeune couple est celle de sa fécondité, car ils n'ont toujours pas d'enfant. Louis XVI a vingt ans et il est marié depuis cinq ans à Marie-Antoinette, qui a un an de moins que lui. Le ménage est uni, mais il vit quasi séparé ; Louis est persuadé qu'il est trop jeune pour l'amour physique, source, lui a-t-on fait croire de libertinage et de risque d'enfanter des monstres... Il est pieux et chaste de nature - ses précepteurs y ont veillé - et le souvenir des frasques de son grand-père et sa haine de madame du Barry, soigneusement entretenus par Mesdames ses tantes, lui font envisager la fidélité conjugale et l'abstinence sexuelle comme quelque chose de normal. [...]



Portrait de Madame du Barry vers 1781 (1743-1793), par Elisabeth Vigée-Lebrun (1755-1842), The John G. Johnson Collection, Philadelphia Museum of Art.
 
De son côté, Marie-Antoinette a été marié à quatorze ans, à peine réglée, à peine formée et sans aucune information préalable de son impératrice de mère. Tout ce qu'on lui a dit est qu'elle devait se soumettre à son mari pour lui donner des enfants ! En grandissant, elle s'est physiquement épanouie et, voyant autour d'elle des grossesses pas toujours faciles, elle a vite considéré qu'il n'y avait, en ce qui la concernait, rien de vraiment pressé, d'autant qu'elle n'est pas foncièrement attirée par le sexe (pour ne pas dire qu'elle est frigide). De plus, son mari n'est pas non plus physiquement épris. [...] Bref, depuis cinq ans ils n'ont pas encore réussi à consommer leur mariage et, assez vite, l'entourage médical se rend compte que les rapports conjugaux du ménage, qui n'étaient au début que fort limités et très hésitants, sont maintenant devenus inexistants. En 1775, sous la pression de sa belle-mère et de Lassonne, médecin de la Reine, le roi avait accepté de voir remettre en cause la contre-indication chirurgicale prononcée par La Martinière et Lieutaud deux ans auparavant. On avait alors demandé l'avis de Moreau, chirurgien de l'Hôtel-Dieu de Paris, qui avait, au grand soulagement du roi, confirmé l'absence d'indication opératoire. Mais ce qui était à la rigueur acceptable tant qu'il n'était que dauphin, ne l'est plus et pose maintenant un problème politique : la reine ne sera vraiment reconnue qu'au jour où la France apprendra la naissance d'un Dauphin.

Heureusement l'empereur Joseph II, frère aîné de la reine, vient à Versailles en avril 1777. A son habitude, il voyage incognito sous le nom de comte Falkenstein. Il vient théoriquement proposer à Louis XVI et à Vergennes les possessions autrichiennes dans les Provinces-Unies en échange de son soutien à l'annexion de la Bavière par l'Autriche. Mais il est surtout envoyé par par leur mère l'impératrice Marie-Thérèse, fort inquiète des rapports de Mercy-Argenteau, son ambassadeur à la cour de France, sur la conduite et l'apparente stérilité de sa fille. Elle a donc chargé Joseph de savoir ce qu'il en est réellement... La Martinière et l'entourage médical attendent beaucoup de cette entrevue et ils ne vont pas être déçus, car tout se sait très vite à la Cour. Quatre jours après son arrivée, Joseph emmène sa sœur faire une longue promenade en tête à tête dans les allées nouvelles du jardin anglais de Trianon. Il lui reproche son penchant pour la dépense, le jeu les bals et sa complaisance pour les excès de la mode. Il lui dit aussi qu'on a signalé à leur mère son caractère de légèreté et d'inconséquence, son comportement excentrique. Enfin il aborde carrément les problèmes du ménage royal et affole sa sœur avec l'idée qu'elle pourrait être répudiée comme bréhaigne... Des confidences qu'il lui arrache apparaît vite qu'il n'y a pas d'obstacle physique à la fécondité du couple. Ils sont ailleurs ! Le lendemain à Versailles, à son retour d'une visite à Louveciennes chez madame du Barry, il s'entretient en particulier avec son beau-frère. Il le découvre beaucoup plus intelligent et ouvert que ce qu'on lui avait annoncé ; mais il lui faut d'abord ôter de son esprit l'idée curieuse que remplir ses devoirs conjugaux serait nuisible à sa santé : ayant été atteint, croit-il, comme son frère aîné, de phtisie dans son jeune âge, le jeune roi craint de s'essouffler alors qu'il est très robuste, grand (il mesure plus d'1,90 m) et qu'il monte tous les jours à cheval et chasse avec fougue. En ce qui concerne sa vie conjugale, il finit par confier qu' "il a des érections fort bien conditionnées, il introduit le membre, reste là sans remuer , deux minutes peut-être, se retire sans jamais décharger, toujours bandant, et souhaite le bonsoir... Ma sœur, ajoute Joseph, avec cela a peu de tempérament et ils sont deux francs maladroits ensemble". [...] En réalité il y a du côté du roi une grande apathie, peut-être même une certaine répugnance, et surtout de la maladresse, associées à un simple rétrécissement forcément un peu douloureux du prépuce. Quant à la reine, elle se refuse à son époux car elle est physiquement assez étroite et que, dans ses tentatives maladroites, il lui fait mal sans apporter de réponse à un tempérament que l'on pourrait s'accorder à penser ataviquement exigeant. Elle est à la fois frigide et frustrée, et la crainte, même refoulée, d'une grossesse n'est pas pour arranger les choses...

Portrait de Joseph II (1741-1790), par Georg Decker (1818-1894), Palais Albertina de Vienne.

Joseph va alors s'expliquer franchement avec tous les deux, ensemble. Il leur intime que leur devoir est d'insister, lui sur la plus grande fréquence, la plus grande vigueur et la nécessaire conclusion de ses assauts, elle sur la nécessité de surmonter ses craintes, ses douleurs et de mieux "accueillir" son époux. Comme il y a certaines incompatibilités d'horaires - le roi s'endort le soir dès neuf heures et la reine ne se couche qu'à l'aube -, Joseph persuade Louis, puisque les deux époux ne peuvent faire couche commune, de visiter sa femme le matin avant son lever ou en début d'après-midi "quand il ne tombe pas encore de sommeil et qu'elle n'est pas encore dans l'impatience de retrouver ses amis"... Et cela va se faire !

On dit que ce fut le 18 août 1777, au bout d'un petit mois de bonne volonté réciproque, la reine sortant du bain et, peut-être, la chaleur propice d'un bel été aidant ! Le roi et la reine semblent maintenant pouvoir "coexister" et s'appliquer, vraisemblablement sans joie mais sans répugnance, à leur devoir dynastique. Sans être une fête, ce n'est plus un désastre. Marie-Antoinette peut écrire à sa mère le 30 août : "Mon mariage est parfaitement consommé, l'épreuve (sic) a été réitérée, et encore hier, plus complètement que la première fois." En fait, la reine est désormais régulièrement honorée par un mari de forte vitalité, sinon de grande virilité. Le 23 avril 1778 "la reine fut déclarée grosse et le roi en parut fort joyeux : il l'aimait fort et paraissait en devenir amoureux". (Duc de Croÿ, Mémoires sur les cours de Louis XV et Louis XVI par le Cte de Grouchy, Nouvelle Revue rétrospective, 1895.) "

 Marie-Antoinette et ses enfants, par Elisabeth Vigée-Lebrun (1755-1842), Château de Versailles.

Source : François Iselin, La Martinière, Chirurgien de Louis XV, éd. Perrin, Coll. Les métiers de Versailles, Paris, 2010, pp.120-121 et pp.166 à 171.

lundi 5 mars 2012

Louis XIII et Anne d’Autriche : un malheur permit la naissance en 1638 de Louis Dieudonné (Louis XIV).

" Marie de Rohan [duchesse de Luynes, qui deviendra la célèbre duchesse de Chevreuse, nom sous lequel l’Histoire se souviendra d’elle] est une jolie brune gaie, vive, à laquelle les hommes ne résistent pas. Vers l’été de 1620, le roi [Louis XIII] semble tomber sous son charme. Ayant découvert tardivement le chemin des dames, le jeune Louis XIII serait-il tenté par une carrière de séducteur, comme l’avait été son père et comme le sera son fils ? Nous savons que non, mais cette année-là, on s’inquiète. L’ambassadeur d’Espagne envoie une lettre à son maître Philippe III qui résume bien la situation : « Après les nombreuses preuves d’amour que lui a manifestées son mari pendant sa maladie, un grand froid est apparu ; et chaque jour voit se multiplier les […] conversations et visites du roi à la duchesse de Luynes. Bien que la reine [Anne d’Autriche] le ressente de manière aiguë, elle le dissimule avec une grande prudence et prodigue à la duchesse comme à son mari toutes sortes de faveurs et de caresse. » Hélas, le roi n’a pas de chance avec les femmes. Il ennuie la duchesse de Luynes qui préfère des amants plus entreprenants et se sent plus proche de la reine. Et Anne commence à apprécier cette jeune femme pétillante et insouciante qui la divertit, la fait rire et ne songe qu’à s’amuser. Les deux femmes deviennent amies, complices. Autour de la reine l’ambiance change, elle est maintenant entourée par une petite compagnie de jeunes femmes proches de son âge qui partagent ses goûts et sa légèreté. Protégée par l’amitié de la reine, Marie de Luynes affiche sa liaison avec le duc de Chevreuse qui scandalise une partie de la Cour. En décembre 1621, le duc de Luynes meurt de la fièvre scarlatine. Le roi se réconcilie avec sa mère, Marie de Médicis, qui revient à la Cour. Il est maintenant tiraillé entre sa femme et sa mère, qui ne s’apprécient guère, et prend en grippe la veuve de Luynes qu’il voudrait voir quitter la Cour. Anne ne veut pas se séparer de son amie. Heureusement, avant que les choses ne s’enveniment, la reine tombe enfin enceinte. Une brise d’allégresse souffle sur le Louvre. Louis ne peut rien lui refuser. Tout se passe sans anicroche jusqu’à la mi-mars.

 Portrait d'Anne d'Autriche (1601-1666), par Rubens, 1625.

Le soir du 14, la princesse de Conti, qui fait partie de la compagnie de jeunes femmes entourant Anne, donne une grande soirée dans ses appartements au Louvre. La reine y assiste avec ses amies dont bien évidemment la plus intime, la belle Marie de Rohan, toute jeune veuve de Luynes. Quand la reine décide de regagner ses appartements dans une autre aile du château, Marie l’accompagne avec Mlle de Verneuil. Au moment de passer la grande salle du trône, Marie, très enjouée ce soir-là, suggère de la traverser en courant. Mlle de Verneuil est enthousiaste, Anne beaucoup moins. Qu’à cela ne tienne ! Les deux jeunes femmes la prennent chacune par le bras et l’entraînent dans leur course. La salle est peu éclairée, la reine ne voit pas le bout de l’estrade sur laquelle est installé le trône, elle trébuche et tombe. Rien ne permet d’affirmer que la chute en est responsable, il ne s’agit peut-être que d’une coïncidence, mais deux jours après cet accident, la reine fait une fausse couche. Le docteur Hérouard note dans son Journal que l’embryon de sexe masculin avait une quarantaine de jours. La déception est à la hauteur des espoirs que cette grossesse avait provoqués.

Louis XIII apprend la nouvelle à Orléans. Il entre dans une colère violente. Il chasse de la Cour les amies de la reine, et tout particulièrement Marie de Rohan. Jamais il ne pardonnera à Anne et à Marie cet accident. Si on avait pu croire qu’un semblant d’intimité pouvait exister entre Louis et Anne, il n’en sera plus jamais question. Mars 1622 marque un tournant dans la vie du couple royal : Louis XIII n’aura plus jamais confiance en sa femme ! "

Source : Alain-Gilles Minella, Pour l’amour de l’enfant roi, éd. Perrin, Paris, 2008, pp.162 à 164.

Massacres à la Révolution française : Jean-Baptiste Carrier, le noyeur.

" Ancien procureur titulaire d’une charge à Aurillac, les débuts de la Révolution verront Carrier se mettre en évidence dans les sociétés populaires En septembre 1792, il est élu à la Convention. Il vote la mort du roi. Peu à peu, il s’affirme comme un républicain intransigeant et désintéressé, ennemi résolu des fédéralistes et des Girondins. Les témoignages recueillis sur sa personnalité s’accordent pour le décrire comme quelqu’un de méfiant, sombre, renfermé, violent à ses heures, fanatiques, coléreux. « Une figure banale, mais bravache, de l’extrémisme révolutionnaire » (J.-J. Brégeon), tel est l’envoyé qui, après la Normandie et la Bretagne où il a fait son apprentissage, arrive à Nantes le 7 octobre 1793 pour, comme il l’écrira lui-même, « sans-culottiser la ville ».

 Lithographie de Jean-Baptiste Carrier (1756-1794) par François-Séraphin Delpech (1778-1825) d'après Zéphyrin Belliard.

[…]

Méfiant, Carrier préfère s’entourer de gens à lui, qui ne dépendent que de lui, et qui ont toute sa confiance. Dès son arrivée à Nantes, il va recruter son équipe : Guillaume Lamberty, un ouvrier carrossier qui s’est illustré contre les Vendéens ; Robert Fouquet, ouvrier tonnelier ; O’Sullivan, un maître d’armes d’origine irlandaise, célèbre pour son implacable férocité et quelques autres du même acabit ; Carrier dispose ainsi de lieutenants prêts à tout pour appliquer les consignes qu’il donnera.

[…]

Au cœur de la Terreur, Nantes aura connu toutes les formes de justice politique : pour suppléer le tribunal révolutionnaire, bien vite jugé insuffisant, des commissions militaires vont être mises en place, beaucoup plus expéditives. Vers la mi-décembre 1793, Carrier peut écrire à la Convention : « La défaite des brigands est si complète que nos postes les tuent et les amènent à Nantes par centaines. La guillotine ne peut suffire : j’ai pris le parti de les fusiller… c’est par principe d’humanité que je purge la terre de ces monstres. » La commission Lenoir et surtout la commission Bignon vont se charger de « nettoyer » les prisons sans distinction d’âge ou de sexe. Entre décembre 93 et janvier 94, plus de 2800 prisonniers seront fusillés dans les carrières proches de la ville. Il faudra réquisitionner des Nantais pour procéder à l’inhumation des cadavres amoncelés… Mais cela s’avère encore insuffisant aux yeux du représentant qui va s’ingénier à trouver un moyen plus expéditif pour en finir avec les prisonniers. Ce sera les noyades, qui vaudront à Carrier sa sinistre réputation.
Depuis l’été 1792, Nantes servait de point de rassemblement pour les prêtres non assermentés qui étaient ensuite déportés en Espagne. Seuls restaient internés dans la ville ceux qui étaient soit trop faibles soit trop âgés. Le 25 octobre 1793, un groupe de ces ecclésiastiques avait été transféré sur La Gloire, un navire hollandais mouillé dans le port de Nantes. Entassés à fond de cale, privés de tout, ils survivaient dans le plus grand dénuement. Carrier chargea Lamberty de prendre les mesures nécessaires pour se débarrasser de ces « foutus calotins ».

Comment faire disparaître ces prêtres réfractaires ? Lamberty n’est pas à court d’imagination. Pour la somme de 200 livres, il se procure un gabare, grosse embarcation à fond plat utilisée pour la navigation sur la Loire, et la fait aménager spécialement, avec des sabords mobiles qui, une fois ouverts, permettent l’immersion immédiate du bateau. Lorsque Carrier rentre à Nantes, après une brève visite à Angers, tout est prêt. Le 5 novembre il donne à Lamberty un ordre écrit lui permettant de passer partout où il le désirera avec un « gabarreau chargé de brigands ». Dans la nuit du 16 au 17 novembre, Lamberty et ses hommes procèdent ainsi à la noyade de 87 prêtres. Trois survivants seront repris et périront dans la deuxième noyade.

Les noyades de Nantes en 1793, Joseph Aubert (1849-1924), 1882, Musée d'art et d'histoire de Cholet.

Cette seconde opération se déroule 6 décembre. 53 prêtres, arrivés d’Angers, sont pris en charge par Foucauld, un adjoint de Lamberty, et ses hommes. Ceux-ci vont d’abord s’employer à dépouiller leurs victimes de tous les biens qu’elles possédaient encore, avant de les faire transférer dans une gabare et de les emmener à l’entrée de l’estuaire où il est procédé à leur submersion. Cette fois le travail est bien fait et il n’y aura aucun survivant… Furieux de n’avoir pas été associé au partage du butin, Lamberty se plaindra auprès de Carrier qui lui donnera, en compensation, le navire La Gloire ! Ces deux noyades de prêtres ont été succès – efficacité et discrétion –, elles vont être le prélude aux grandes noyades de frimaire et de ventôse. Car il faut en finir avec les prisonniers et Carrier y est bien décidé. La procédure du tribunal révolutionnaire, on l’a dit, est jugée trop lente : « Vous êtes un tas de bougres de juges, un tas de jean-foutre auxquels il faut des preuves, des témoins, pour faire guillotiner un homme… Foutez-les moi à l’eau, c’est bien plutôt fait », apostrophe Carrier.

Le 16 frimaire il écrit à la Convention qu’il a découvert – et maîtrisé – un complot des prisonniers, dont il a fait fusiller 6 meneurs. Et de conclure : « Une grande mesure va nous délivrer des autres. » Il lui faut, par tous les moyens, se débarrasser des prisonniers. Les noyades se sont révélées une technique efficace, pourquoi ne pas continuer ?

Dans la nuit du 14 au 15 décembre est opérée la troisième noyade, dite du Bouffay, qui va coûter la vie à 129 détenus. Elle est menée par Goullin, responsable du comité révolutionnaire, aidé d’une équipe de « Marats » passablement ivres. Embarqués sur une sapine les malheureux sont noyés au large de Trentemoult, en aval de Nantes. Mais il y aura deux survivants, et l’un d’eux pourra témoigner au procès de Carrier, un an plus tard…
Pour les noyades suivantes, la plus grande incertitude règne. Combien d’opérations, combien de victimes ? Pour Alfred Lallié huit noyades ont fait suite aux trois premières. Gaston Martin en dénombre trois certaines et une probable, sans compter les noyades individuelles. La noyade du 23 décembre (3nivôse) est établie, indiscutablement. Elle fera, à elle seule, 800 victimes.

Du 29 décembre 1793 au 18 janvier 1794, on recense encore deux ou trois noyades. Selon les témoignages recueillis, elles firent à chaque fois 200 ou 300 victimes, hommes, femmes et enfants. Ces opérations ont été menées par Fouquet et ses hommes qui ne manquaient pas de procéder au dépouillement systématique de leurs victimes. D’après J.-J. Brégeon, la dernière noyade eut lieu dans la nuit du 29 au 30 janvier et a concerné 400 détenus.

Combien de victimes au total ? Les historiens sont divisés. Entre les chiffres proposés par A. Lallié (4860) et ceux avancés par Gaston Martin (1800) l’écart est important. Mais l’un est monarchiste et l’autre, révisionniste avant la lettre, cherche à amoindrir la responsabilité de Carrier et des terroristes nantais. Peu importe, d’ailleurs, le chiffre exact : « L’essentiel est qu’il s’agit non d’un fait accidentel ou isolé mais de l’application systématique d’une méthode d’extermination sans jugement ni discernement. » (Paul Bois).

Il est établi par contre que Carrier ne participa jamais directement aux noyades. Ayant une confiance totale – et justifiée – en Lamberty et ses acolytes, il n’avait nul besoin d’être sur les lieux. Et il est probable qu’il n’y tenait pas. S’il est incontestable que des enfants furent noyés, cela ne participait pas, semble-t-il, d’une volonté systématique du représentant. Quant aux célèbres « mariages républicains » (prêtres et religieuses qui aurait été ligotés, sur ordre de Carrier, dans des postures obscènes avant d’êtres noyés), ils relèvent de la légende, aucun témoignage n’ayant été recueilli sur ce point. Ce qui est par contre solidement établi c’est le dépouillement systématique des victimes de tous les objets de quelque valeur qu’elles pouvaient avoir sur elles, y compris leurs vêtements qui étaient revendus aux fripiers. Si Carrier mourut pauvre, certains des tueurs laissèrent de belles fortunes ! Enfin de nombreuses femmes furent l’objet de sévices sexuels avant d’êtres noyés…

En conflit avec le comité révolutionnaire de Nantes, qui supporte mal son autoritarisme et ses foucades, Carrier est finalement rappelés à Paris, le 16 février 1794. Son proconsulat n’aura duré que quatre mois. Peu après son départ, Lamberty et Fouquet seront arrêtés à l’initiative du comité révolutionnaire. Condamnés à mort, ils seront exécutés le 16 avril.

Après la chute de Robespierre, la Convention thermidorienne va trouver, en Jean-Baptiste Carrier, un bouc émissaire idéal, le symbole de la terreur dans son expression la plus paroxystique. Elle obtiendra sa mise en accusation et celle du comité révolutionnaire nantais. Si la plupart des terroristes nantais sauvèrent leur tête, Carrier fut condamné à mort et exécuté le jour même, le 26 frimaire de l’an III de la République. Il avait 36 ans.

 Lame de la guillotine ayant servi pour l'exécution de Jean-Baptiste Carrier le 16 décembre 1794, Science Museum of London.

On a beaucoup glosé sur la personnalité de Carrier. Certains l’ont décrit comme un monstre un escroc, un alcoolique, un maniaque sexuel, bref un disciple satanique de son contemporain, le marquis de Sade. Il n’en est rien. Carrier n’est pas Gilles de Rais. Il incarne un type de personnage d’un genre nouveau, à la personnalité banale, ordinaire, qui se met totalement au service d’une cause vécue comme un absolu. Confronté à des circonstances exceptionnelles, le représentant en mission, véritable commissaire politique, n’a que l’impérieux devoir de faire triompher la cause sacrée. Or le triomphe de la cause passe nécessairement par l’élimination totale de l’ennemi, l’incarnation du Mal. Personnage étonnamment moderne, Carrier préfigure le grand commis du totalitarisme, qui connaîtra, par la suite, la fortune que l’on sait. Et les noyades de Nantes annoncent, elles aussi, par leur caractère systématique, un type de crime que le XXème siècle verra, sur une toute autre échelle, s’épanouir. "

Source : article de Philippe-Yves Le Grand paru dans la revue Historama spécial n° 20, 1793 : La Vendée en guerre, 1991.

Les mots "L'Etat, c'est moi !" ne furent jamais prononcés par Louis XIV.

" En 1654 on avait consommé d’avance les revenus des années 1655 et 1656. Les bailleurs des fonds, devenus timorés, se souvenaient de la banqueroute partielle de 1648. On ne parvenait plus à payer les soldats de la maison du roi. En 1655 et 1658 les armées durent suspendre leurs opérations dans l’attente d’argent frais collecté. Sans les financiers et les traitants,sans les manutentionnaires, qu’aurait valu le génie de Turenne ? Une troupe non payée se débande.

La Fronde, dira-t-on avait eu au moins le mérite d'éradiquer toute velléité de résistance du Parlement. Eh bien, pas du tout ! Forts de leur indépendance, les magistrats profitèrent de la situation pour relever la tête.Afin d'assurer de nouvelles rentrées fiscales le pouvoir avait inventé des taxes sur les actes de baptême et d'enterrement, les parchemins et les papiers marqués ; il avait créé 46 nouveaux offices de secrétaires offices de secrétaires du roi. Au total, 17 édits bursaux avaient été présentés à la signature de Louis XIV qui, pour briser la grogne prévisible du Parlement,s'était rendu au palais avec son chancelier le 20 mars 1655 et les avait fait enregistrer par lit de justice.

 Le buste de Louis XIV (1665), réalisé par Gian Lorenzo Bernini (1598-1680), dans le Salon de Diane au Château de Versailles. Sculpture sur marbre blanc (105cm x 99cm x 46cm).

Mais, dès le lendemain, l'agitation s'empara des esprits. Les jeunes conseillers de la Chambre des enquêtes - toujours les mêmes - réclamèrent la tenue d'une nouvelle assemblée afin de réexaminer, en l'absence du roi et par conséquent en toute liberté de suffrage, les édits « pour voir s'ils étaient conformes à la justice ». Une première réunion se tint au début d'avril, à la grande colère de Louis XIV, qui y vit, à juste titre, une intolérable atteinte à son autorité. Le 13 avril, il chassait à Vincennes lorsqu'il apprit que le Parlement allait à nouveau s'assembler. Rentrant aussitôt, il décida de tenir le jour même un lit de justice. Il fit annoncer sa venue aux magistrats par ses capitaines des gardes et ne se donna pas la peine de changer de costume : justaucorps rouge, grosses bottes, chapeau gris sur la tête. Précédé de M. de Rhodes, grand maître des cérémonies, du chancelier, des ducs et pairs, des maréchaux de France, le roi cependant respecta les formes :il fit d'abord ses dévotions à la Sainte-Chapelle avant de pénétrer dans la Grand-Chambre. Là, il s’assit et d’un « air sévère et hautain » déclara : « Messieurs, chacun sait les malheurs qu’ont produits les assemblées du Parlement. Je veux les prévenir et que l’on cesse celles qui sont commencées sur les édits que j’ai apportés, lesquels je veux être exécutés.Monsieur le premier président, je vous défends de souffrir aucunes assemblées,et à pas un de vous de les demander. »1 Puis il se leva et, laissant ces messieurs abasourdis, s’en revint au Louvre.

La fermeté de ton surprit tellement que la légende, bientôt, s’empara de cette scène et en crayonna une image d'Épinal aussi fausse que ridicule. Combien de récits décrivent Louis XIV, un fouet à la main, venant dompter le Parlement en lui déclarant : « L'État, c’est moi ! » En fait, jamais de sa vie le roi ne prononcera cette parole prétendue historique. "

1 : C'est le texte officiel qui figure dans les registres du Parlement (François Bluche, Louis XIV vous parle, Paris, 1988, p.35). Ce texte est assez voisin de celui donné par l'auteur anonyme du Journal d'un bourgeois de Paris pendant la Fronde (Bib. Nat. Ms franç. 10 275, p.328).

 Source : Jean-Christian Petitfils, Louis XIV, éd. Perrin, coll. Tempus, Paris, 2002, pp.164-165.

dimanche 4 mars 2012

Livre : Jean-Christian Petitfils, "Fouquet".

Jean-Christian Petitfils, Fouquet, éd. Perrin, 2008.
ISBN : 978-2-262-02950-0

Note : * * * * *

Commentaire : Élégance du style qui s'allie si bien à ce personnage fascinant.

Livre : Jean-Christian Petitfils, "Louis XVI".

Jean-Christian Petitfils, Louis XVI, éd. Perrin, 2005.
ISBN : 978-262-01484-1.

Note : * * * * *

Commentaire : Jean-Christian Petitfils signe une œuvre magistrale et incontournable pour celles et ceux qui s'intéressent au dernier Roi de l'Ancien Régime.